N° 5 - Avril 2011
ISSN : 1772-7200
Le tournant des XIIe et XIIIe siècles constitue une époque de changements profonds dans la société médiévale. Tandis que les villes se développent au rythme du commerce, une première renaissance culturelle s'épanouit dans un contexte relativement propice – ni guerre durable ni grande épidémie ne frappent alors les populations d'Europe de l'Ouest. Une piété particulière voit le jour, portée par le rêve d'un retour à l'idéal évangélique de pauvreté et de diffusion de la Parole. Deux hommes, nés presque en même temps, l'un en Espagne, l'autre en Italie, vont incarner cette tendance nouvelle, chacun à sa manière. Doués d'un prestige immense de leur vivant, rapidement sanctifiés par l'autorité papale, Dominique et François sont à l'origine de nouveaux ordres non monastiques, ouverts sur le monde laïque et leur temps, voués à un essor extraordinaire : les ordres mendiants.
« Petite plante du bienheureux père François ». C'est ainsi que Claire d'Assise se définit dans le préambule de la règle qu'elle compose en 1253 pour ses sœurs, que l'on appellera plus tard les clarisses. En utilisant cette expression, Claire insiste sur le lien qui l'a unie à François, une relation de filiation spirituelle dans laquelle, selon ses propres termes, elle aurait tenu un rôle essentiellement passif. La métaphore de la plante est révélatrice de la nature dissymétrique de la relation unissant les religieuses aux frères mendiants : tandis que les premières ont sans conteste besoin des frères aussi bien pour des raisons institutionnelles (rattachement à un ordre religieux) que spirituelles et liturgiques (pour la messe, les confessions, les prêches), la réciproque n'est pas vraie. D'ailleurs, les frères ont toujours tenu à garder une certaine distance vis-à-vis de celles que l'on hésite à appeler des sœurs mendiantes.
Auteur : Sylvie Duval
Magazine : Religions & Histoire hors-série n° 5 Page : 20-25
Date : 28/03/2011