N° 46 - Septembre/Octobre 2012
ISSN : 1772-7200
Lorsque l’on parle d’hérésie dans le monde chrétien, deux périodes sont plus particulièrement concernées: les premiers siècles du christianisme, qui virent diverses pensées théologiques dissidentes s’épanouir, et le Moyen Âge central et finissant, durant lequel flambèrent maints bûchers d’hérétiques. Si les hérésies des premiers siècles, souvent méconnues du grand public mais étudiées par les spécialistes, sont relativement bien définies autour de grandes figures et de lieux de diffusion, les mouvements chrétiens médiévaux qualifiés par l’Église romaine d’hérésies sont plus difficiles à cerner. L’historiographie a longtemps erré de lectures erronées en fantasmes inavoués, donnant de ces groupes une image fausse aujourd’hui largement répandue. Dans ce dossier, les historiens reviennent aux sources des hérésies médiévales en s’appuyant sur les documents textuels et iconographiques. Pour nous, ils débrouillent l’écheveau politique, culturel et théologique qui aboutit à l’invention de l’hérésie médiévale.
Tout au long du Moyen Âge, l’accusation d’hérésie fut strictement liée à la définition des dogmes chrétiens: on qualifiait d’hérétiques des théologiens dont les positions étaient réfutées lors des conciles. À partir du XIe siècle cependant, on observe un phénomène nouveau : les sources accusent d’hérésie des hommes et des femmes qui ne sont ni savants, ni même parfois identifiables, et dont les croyances restent fréquemment impossibles à retracer. La condamnation de ces individus, que les sources désignent quelquefois du nom de «manichéens» ou d’«ariens», peut s’accompagner d’une violence extrême, inconnue jusqu’alors. Comment expliquer ce phénomène? Faut-il penser à une résurgence de l’hérésie antique, comme on l’a cru pendant longtemps?
Auteur : TRIVELLONE (A.)
Magazine : Religions & Histoire n° 46 Page : 18-25